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Insolite : L’écurie de Formule 1 qui n’a jamais existé, USF1

Insolite : L’écurie de Formule 1 qui n’a jamais existé, USF1

Lundi 29 mai 2023 par René Fagnan
Crédit photo: YouTube

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Depuis des décennies, le sport automobile américain a démontré assez peu d’intérêt pour la Formule 1, préférant ses séries nationales IndyCar et NASCAR. Il y a bien eu quelques tentatives comme les écuries Parnelli, Haas, Shadow, AAR de Dan Gurney, Beatrice-Lola et Penske.

Le projet d’une autre écurie américaine a fait les manchettes il y a de cela une quinzaine d’années ; pas par ses performances, mais parce qu’elle n’a été qu’un projet qui ne s’est jamais concrétisé.

Début 2009, la FIA projette d’avoir des grilles de départ de Grands Prix à 26 voitures. Elle lance un appel d’offres pour accepter trois nouvelles écuries pour la saison 2010. Ces trois projets se nomment Manor F1 Team, Campos Meta et USF1. La FIA, qui est en discussions avec les écuries existantes quant au renouvellement des Accords de Concorde, laisse filtrer que toutes les équipes seront désormais soumises à un plafond budgétaire annuel de 64 millions de dollars US.

Le projet américain USF1 est dirigé par Peter Windsor et Ken Anderson. Ce dernier est un ingénieur qui a essentiellement travaillé en série IndyCar, d’abord chez Penske Shocks avant de fonder son entreprise d’amortisseurs, Quantum Suspension Technology & Quantum D.A.T.A. L’autre associé, Peter Windsor, est un ancien journaliste réputé. Grand ami de Nigel Mansell à ses débuts, il a été le gérant sportif de l’écurie Williams.

USF1 voulait créer une écurie 100% américaine, qui attirerait des commanditaires américains et ferait rouler deux pilotes américains. Immédiatement, les noms de Danica Patrick et Scott Speed sont mentionnés.

L’équipe étonne en annonçant qu’elle s’implantait à Charlotte en Caroline du Nord, là où sont logées presque toutes les écuries de NASCAR. Anderson justifie son choix par le nombre impressionnant de sous-traitants qui sont installés dans la région, tout en ajoutant que USF1 aura une base opérationnelle au circuit Motorland Aragón en Espagne. L’écurie s’installe donc à Charlotte dans des locaux qui logeaient précédemment les écuries NASCAR de Joe Gibbs Racing.

Le fondateur de YouTube, Chad Hurley, s’associe au projet et devient un sponsor potentiel de l’écurie. USF1 annonce ensuite son intention d’utiliser le moteur Cosworth CA2010 et de concevoir une boîte de vitesses transversale avec l’aide d’EMCO Gears.

Les (gros) ennuis commencent

Cependant, à l’automne 2009, le premier jet du texte des nouveaux Accords de Concorde ne fait plus de mention du fameux plafond budgétaire…  Les trois nouvelles écuries sont extrêmement déçues, car les écuries majeures pourront dépenser comme elles le veulent.

En novembre, un anonyme qui travaille chez USF1 fait savoir à la FIA que l’écurie américaine sera incapable de disputer le premier Grand Prix de la saison 2010 à Bahreïn. En effet, cela fait plusieurs semaines que ses dirigeants sont silencieux. Trop silencieux. Et la situation inquiète le grand patron de la F1, Bernie Ecclestone.

Windsor sent le besoin de rassurer tout le monde et accorde une interview complaisante au réseau ESPN. Et le lendemain, USF1 met enfin en ligne son site web et active son compte Twitter.

Le 21 novembre, USF1 annonce en grandes pompes de recrutement du pilote argentin José María López qui n’a pas connu de gros succès en GP2, mais qui apporterait une dot de huit millions de dollars US. Puis, James Rossiter, pilote d’essais de Honda en F1, est nommé comme deuxième pilote.

Nous sommes au début de 2010 et l’écurie n’a rien de nouveau à annoncer. Selon des anonymes, Ken Anderson veut tout contrôler, tout approuver, tout vérifier, et cela prend un temps fou. Puis, USF1 demande à la FIA s’il lui serait possible de rater les quatre premiers Grands Prix de la saison. Ça ne sent pas bon.

Une rumeur circule, voulant que Chad Hurley se soit retiré du projet et discute avec le Serbe Zoran Stefanović pour qu’il reprenne le projet, ce qui n’aboutit pas. Un commanditaire potentiel, l’entreprise suisse de services financiers Locstein, publie ensuite un communiqué de presse qui annonce officiellement son retrait du projet.

Un mois avant la première course, la voiture ne se compose que de quelques pièces, dont les deux structures en carbone qui doivent composer le châssis. Charlie Whiting est envoyé à Charlotte comme inspecteur de la FIA. Son verdict est sans appel : USF1 ne sera pas prête à temps.

Le 2 mars, l’écurie ferme ses portes et licencie sa soixantaine d’employés. En juin 2010, le Conseil mondial du sport automobile de la FIA mène une audience disciplinaire sur le flop de USF1 et condamne Windsor et Anderson à payer une amende de 255 000£ (soit 430 000$ canadiens) plus les frais et a interdit à ce qui restait de l'équipe de participer à tout championnat sanctionné par la FIA.