En 1985, la brasserie Labatt, qui a payé la construction du circuit automobile de l’Ile Notre-Dame qui porte maintenant le nom de Gilles-Villeneuve, désire rentabiliser ses installations et espère présenter une deuxième course en plus du Grand Prix de Formule 1.

Cela fait presque trois ans que Gilles Villeneuve a perdu la vie sur le tracé de Zolder en Belgique le 8 mai 1982. Par chance, un autre pilote québécois, Bertrand Fabi de Sherbrooke réalise des exploits. Il a récemment été sacré champion canadien de Formule 2000 et il gagne maintenant des courses en Europe dans cette même catégorie. Bien soutenu par son mentor, Raymond David, il semble être destiné à monter en F1 d’ici peu.

Simultanément, la FIA remplace la Formule 2 par la Formule 3000. Ce sont à peu de choses près les mêmes châssis qu’en F2, mais propulsés par des moteurs V8 atmosphériques au régime moteur limité électroniquement. Visuellement, une F3000 ressemble pas mal à une F1, mais elle est moins puissante. La F3000 devient ainsi la porte d’entrée de la F1.

Le Grand Prix du Canada 1985 a lieu le 16 juin et en août, Pierre Lecours du Journal de Montréal écrit qu’une rumeur a commencé à circuler lors du tournoi de golf Grand Prix Labatt de Trois-Rivières à l’effet que la brasserie Labatt étudiait la possibilité de présenter quatre courses de F3000 au Canada, dont deux au Québec.

Pierre Lecours ajoute que flotte l’idée de présenter une deuxième course sur le circuit Gilles-Villeneuve en septembre et ce serait une épreuve de F3000. Lecours parle de deux courses dans l’ouest canadien, à Westwood en Colombie-Britannique et à Race City à Calgary, une course au Grand Prix de Trois-Rivières et une dernière à Montréal.

Dans un autre article paru à peine une semaine plus tard, Lecours cite Roger Doré, directeur de la promotion à la brasserie Labatt, qui fait comprendre que la raison principale de cet intérêt envers la F3000 est surtout pour rentabiliser les installations au circuit Gilles-Villeneuve. Labatt désire aussi assurer le succès futur de son Grand Prix de F1 en aidant un espoir canadien à monter en F1.

Des frictions causent l’annulation du projet

Roger Doré de Labatt et Pierre Houde, le directeur général du Grand Prix du Canada, assistent à la course de F3000 présentée sur le tracé de Spa-Francorchamps en Belgique le 2 juin, juste avant le Grand Prix du Canada. Leur idée est de mettre sur pied une structure “Team Canada” qui apporterait un soutien logistique et financier à des espoirs canadiens dans les séries de F1600, F2000 et F3000.

Les négociations progressent et les choses évoluent. Si on parle toujours de présenter quatre courses de F3000 au pays, on n’en mentionne qu’une seule dans l’ouest, une en Ontario sur le circuit de Mosport Park et deux au Québec : à Trois-Rivières et à Montréal.

Cependant, à la mi-octobre, lorsque la FIA attend une confirmation de la part de la brasserie Labatt, le projet tombe brusquement à l’eau. « La lenteur des négociations avec les parties impliquées, dont les nouveaux locataires de l’Ile Notre-Dame, le Parc agro-alimentaire, ont forcé les responsables du projet à rompre les pourparlers » peut-on lire dans le Journal de Montréal.

Roger Doré insiste sur les interventions menées par le Club nautique et de plein air de Montréal. « Leur très vive opposition à nos différents projets témoigne de l’énorme écart qui sépare nos intérêts respectifs » peut-on lire.

Cette décision d'annuler une potentielle deuxième course peut-elle remettre en cause la présentation du Grand Prix F1 du Canada ? « C’est une possibilité si les responsables de Labatt ne peuvent atteindre leurs objectifs avec la Phase 2 [une deuxième course à Montréal] de leur projet de rentabilisation » déclarait alors Pierre Houde.

L’idée de tenir une course de Formule 3000 au Québec refait son apparition en 1990. Lorne Germain du Grand Prix de Trois-Rivières parle alors d’une possible course de F3000 lors de l’édition de 1991. Germain précise que le circuit urbain devra être inspecté par la FIA, et précise qu’il sait déjà que la ligne de départ/arrivée ainsi que la ligne des puits devront être modifiés, et qu’il fuadra aussi accroître le nombre de gradins pour les spectateurs.

Pour toutes sortes de raisons, cet autre projet de course de Formule 3000 en sol québécois n’a pas vu le jour.

Nous tenons à remercier Dominic St-Jean pour son aide précieuse à documenter ce texte.