Une étrange nouvelle écurie de Formule 1 serbe a fait la une de l'actualité du sport automobile durant plusieurs mois en 2009 et 2010, en tentant de participer au Championnat du monde et en esseyant de recruter le Québécois Jacques Villeneuve, Champion du monde en 1997.

Cette équipe de F1, Stefan Grand Prix, a été créée par l’ingénieur et homme d’affaires serbe Zoran Stefanović qui a aussi été pilote automobile amateur dans l’ancienne Yougoslavie. Stefanović prétend avoir discuté avec Bernie Ecclestone d’un projet de Grand Prix de Yougoslavie en 1987 avant que la situation politique de son pays se dégrade. Le Serbe aurait ensuite été intéressé à racheter le projet et les monoplaces MasterCard Lola après que cette écurie eut vite jeté l’éponge, mais cela n’a pas fonctionné.

Courant 2009, la FIA lance un appel d’offres pour inscrire trois nouvelles écuries de F1 en 2010. Une quinzaine de propositions sont envoyées à la FIA qui retient celles de Campos Meta et Manor Grand Prix (deux écuries qui allaient disparaître au bout de quelques saisons), ainsi que la nébuleuse structure USF1. Le projet de Stefan Grand Prix est rejeté, ce qui incite Stefanović à porter plainte à la Commission européenne, prétextant que la FIA a injustement favorisé des projets utilisant le moteur Cosworth. Entre-temps, Stefanović conclut un partenariat avec la firme serbe d’ingénierie AMCO et recrute l’ancien ingénieur McLaren Mike Coughlan, un des deux acteurs de la fameuse histoire d’espionnage entre Ferrari et McLaren.

Pendant que les trois nouvelles équipes tentent de se préparer à faire leur entrée en F1 en 2010, Toyota annonce, en septembre 2009, qu’elle quitte la F1, imitant ainsi BMW et Honda, ce qui libère une place sur la grille. Stefanović déclare avec conviction que son écurie sera au premier Grand Prix de 2010 à Bahreïn, mais il n’a pas de voitures, ni d’inscription au championnat. Il tente alors de négocier l’achat de l’inscription au championnat que détient USF1, mais Ken Anderson et Peter Windsor s’y opposent. Il se tourne alors vers Adrian Campos qui lui exige la somme de 40 millions de dollars pour lui céder ses droits. C’est un nouvel échec.

Une ultime tentative

Il passe alors un accord avec l’écurie Toyota qui a construit une voiture pour la saison 2010, la TF110 (photo ci-dessus). Le Serbe récupère ces monoplaces, des moteurs Toyota, de l’équipement, engage du personnel et loue des bureaux dans l’édifice de Toyota Motorsport à Cologne. L’écurie rebaptise le châssis Stefan S-01 et son moteur, le Stefan RG-01, mais il ne reste que six courtes semaines avant le début de la saison 2010.

Stefanović fait ensuite expédier deux conteneurs pleins d’équipement. Un s’en va à Bahreïn et l’autre, à Kuala Lumpur. Stefan Grand Prix prévoit aussi participer aux essais présaisons organisés à l’Autódromo Internacional do Algarve, au Portugal, mais Bridgestone refuse de fournir des pneus à l’écurie serbe et les essais sont annulés. Pourtant, Stefanović a engagé Kazuki Nakajima puisqu’il est un pilote Toyota, et vise à engager Jacques Villeneuve comme second pilote, en plus de Pastor Maldonado comme pilote d’essais.

Les choses "progressent" un peu quand Nakajima roule à bord de la voiture de F1 sur le parking de l’usine Toyota (eh oui) et que Villeneuve fait mouler son siège, bien qu’il n’ait pas signé de contrat. Cependant, bien des gens se demandent si Stefanović dispose bien des millions de dollars requis pour courir en F1. Les dirigeants de Toyota s’inquiètent de ne pas voir l’argent promis être versé pour l’utilisation de ses voitures, de ses moteurs et de ses installations. Il n’en faut pas plus pour que Toyota mette un frein à cette "collaboration" et exige que Stefan Grand Prix lui remette tout ce qu’il a emprunté. La marque fait aussi rapatrier ses deux conteneurs.

Le Grand Prix de Bahreïn est disputé sans l’écurie Stefan Grand Prix. Stefanović a abandonné son projet, temporairement. Il faut avouer que le Serbe a commis plusieurs erreurs cruciales. Tout d’abord, il n’a pas suivi le processus normal d’inscription d’une écurie de F1 au championnat du monde et a tenté d’entrer en F1 par la porte arrière, ce qui n’a pas plu à plusieurs. De plus, il a toujours affirmé qu’il possédait une voiture et qu’il était prêt à courir, ce qui était faux. Puis, le recrutement de Mike Coughlan, persona non grata en F1, a irrité plusieurs dirigeants d’autres équipes.

Pour terminer, la FIA, soumise à ses propres règlements, ne pouvait tout simplement pas remplacer USF1 par Stefan Grand Prix sans s’attirer des mises en demeure provenant d’autres équipes dont le projet avait été initialement refusé. La FIA aurait alors été forcée de procéder à un nouvel appel d’offres aux équipes intéressées, mais à quelques jours du début de la saison, le temps manquait.