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Pierre Dieudonné : Le stratège de l’équipe Audi WRT, qui fait rouler Daniel Morad aux 24 Heures de Daytona…

Pierre Dieudonné : Le stratège de l’équipe Audi WRT, qui fait rouler Daniel Morad aux 24 Heures de Daytona…

Vendredi 24 janvier 2020 par Philippe Brasseur
Crédit photo: Audi Sport

Crédit photo: Audi Sport

Pour la seconde année consécutive, l’équipe officielle Audi WRT participe aux 24 Heures de Daytona. Un engagement qui se fait en collaboration avec Audi Canada et qui verra demain au départ l’équipage Daniel Morad, Dries Vanthoor, Rolf Ineichen et Mirko Bortolotti se battre pour la victoire en classe GTD avec leur Audi R8 GT3.

WRT est un nom souvent entendu en sport automobile, et pour cause ! L’équipe de Vincent Vosse est impliquée en DTM et dans plusieurs séries de GT3. Toujours avec Audi. Une organisation importante qui compte en son sein un directeur sportif qui arpente les circuits une… cinquantaine d’années ! Son nom : Pierre Dieudonné, 4 fois Top 10 aux 24 Heures du Mans, pilote de monoplace et lauréat des 24 Heures de Spa au siècle dernier. Nous l’avons rencontré à la veille du départ. Entrevue qui mêle passé, présent et… ambitions pour ce week-end et au-delà !

Pierre, quel est ton rôle au niveau de l’équipe WRT ?

Je m’occupe de la partie sportive, c’est-à-dire bien sûr la connaissance des règlements, s’assurer que tout le monde dans l’équipe les règles et ne fait pas d’erreur par rapport à ça. Cela inclut forcément aussi les relations avec les officiels, la direction de course, les commissaires sportifs, etc., ainsi que la gestion des pilotes. Depuis quelques années, ça devient de plus en plus complexe et là encore une fois, mon rôle c’est de m’assurer que les pilotes sont bien au courant des règlements. Et quand ils font des conneries, qu’ils sont appelés chez les officiels et bien j’essaye de les défendre, de négocier !

Tu es présent à tous les événements que dispute WRT dans la saison ?

Non, parce qu’il y en a beaucoup trop. On a donc dû scinder. Au début, j’ai commencé mon implication dans cette équipe avec le GT3. Mais en 2014, j’ai été rejoint par Thierry Tassin, lui-même ancien pilote vainqueur des 24 Heures de Spa, et nous avons commencé à travailler ensemble. Désormais, lui s’occupe du DTM, des courses de série VLN et les 24 Heures Nürburgring. Pour ma part, je m’occupe des séries World Challenge, Intercontinental GT Challenge ainsi que de ce programme en IMSA.

C’est la seconde participation de l’équipe WRT à Daytona. Après 2019 où vous aviez fini troisièmes, un podium est-il de nouveau l’ambition ?

Nous avons fini troisièmes l’année dernière donc l’objectif est de viser mieux, même si on sait que ce sera très difficile. Mais il faut viser la victoire. Je pense qu’on a les outils pour le faire. Maintenant, il faut rester très humble. Quand on arrive en IMSA, c’est très différent des habitudes des courses en Europe. Il faut connaître la mentalité qui est un peu différente, il y a un travail d’apprentissage à faire et des connaissances à acquérir. C’est moins difficile la deuxième année bien que venir faire Daytona est compliqué pour une équipe basée en Europe.

L’année dernière, le pilote canadien de l’équipe était Roman De Angelis, qui débutait à Daytona. Cette année, c’est Daniel Morad qui a déjà roulé aux 24 Heures et même gagné en GTD il y a 3 ans. Pour toi, est-ce plus facile de gérer un jeune pilote comme Roman ou travailler avec Daniel ?

L’an dernier, Roman, on ne le connaissait pas du tout quand il s’est joint à l’équipe. Mais il s’est vraiment révélé pendant la course. C’est un jeune qui a un gros potentiel et ça s’était super bien passé avec lui. Et puis, j’ai connu Daniel Morad qui nous a rejoint pour ces 24 Heures 2020 et je trouve que c’est un pilote super à tous les points de vue. Il est hyper professionnel mais en plus très, très accommodant, très facile à vivre.

Toi qui est en sport automobile depuis un demi-siècle, comment vois-tu l’évolution des courses d’Endurance ?

Disons qu’il y a 2 façons de voir les choses… Pour l’instant, il y a toujours un pilote derrière le volant, je ne sais pas pour encore combien de temps, mais c’est encore le cas. Il doit faire le boulot, ça reste la même activité mais on est passé dans un autre monde par rapport aux années 1970 à 90. Parce qu’aujourd’hui, pour faire rouler une GTD, ça prend une équipe d’une quinzaine de personnes, dont un ingénieur d’exploitation, un ingénieur de stratégie, un ingénieur de datas. On est loin d’il y a 50 ans quand Jo Siffert mettait sa F1 sur une remorque et, avec son mécanicien, il allait faire des Grand Prix ! On est très loin de cette époque-là. Tout le sport automobile a complètement changé. Avant, l’équipe se fiait sur ce que disait le pilote, c’est lui qui avait les sensations et même si le pilote n’était pas ingénieur, il était important au niveau de la mise au point de la voiture. Maintenant, avec les acquisitions de données, le pilote est entouré, géré par les ingénieurs.

Est-ce pour autant plus facile pour un pilote aujourd’hui ?

C’est autre chose, c’est un autre monde. Avec les ordinateurs, les téléphones portables, les réseaux sociaux, l’environnement, tout a changé. Il faut composer avec cette réalité sans chercher à se dire que c’était mieux ou moins bien avant. Il faut suivre l’évolution des choses.

Outre Daytona, l’équipe WRT devrait aussi rouler à Sebring cette saison. Est-ce dans les plans à court terme de faire plus de courses en Amérique du Nord ?

On va voir ce qui va se passer ici à Daytona. Mais on devrait effectivement aller aux 12 Heures de Sebring et on va pousser pour en faire d’autres en IMSA. Si ça marche bien ici et si on fait Sebring et que ça marche bien à Sebring aussi, alors on essayera de faire les 6 Heures de Watkins Glen et puis le Petit Le Mans en fin de saison. L’IMSA, ce sont vraiment de belles courses. Ça plaît également à Audi de faire partie de cette compétition.

Justement, pour nous en Amérique du Nord, c’est difficile de comparer les séries. À quel niveau situes-tu l’IMSA par rapport aux championnats européens ?

C’est différent. C’est surtout beaucoup plus agréable que les séries européennes parce qu’on sent beaucoup plus la passion, y compris et surtout chez les organisateurs de la série. Je trouve qu’il y a un esprit qui n’est pas comme en Europe. Sous l’influence de la FIA, les séries européennes sont parfois trop rigoureuses. En IMSA, c’est moins politique. En tant que compétiteur, il y a une phase d’apprentissage mais on vient participer à des courses et on se sent bien d’être là. Par exemple, je viens de faire deux années à gérer notre équipe en championnat WTCR (World Touring Car). Je ne dis pas que c’était une punition, mais je n’ai pas aimé parce qu’il y a trop de politique. C’est un beau championnat mais je n’y prenais pas beaucoup de plaisir alors qu’ici, on est entre gens de course… et des gens passionnés ! C’est communicatif. Tous le personnel de l’IMSA avec qui on travaille est passionné par ce qu’il fait. Tout le monde est heureux d’être là. En IMSA, ils comprennent le point de vue des compétiteurs aussi, c’est important.
 

Le départ des 24 Heures de Daytona 2020 aura lieu ce samedi, à compter de 13h40.