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Rétro 1955: L’élégante, mais inefficace Sumar Streamliner IndyCar

Rétro 1955: L’élégante, mais inefficace Sumar Streamliner IndyCar

Mardi 16 mai 2023 par René Fagnan
Crédit photo: IndyCar

Crédit photo: IndyCar

La Sumar Streamliner est une voiture carrossée au look sport qui semble être destinée à disputer les 24 Heures du Mans plutôt que de rouler sur le super ovale d’Indianapolis.

C’était à une époque où le livre de règlements techniques des 500 Milles d’Indianapolis était, disons, permissif et assez conciliant avec des idées parfois insensées. Une de ces créations est la Sumar Special Streamliner.

En 1954, Chapman S. Root et Don Smith demandent au concepteur de voitures de course Frank Kurtis de leur produire une voiture vraiment spéciale pour l’Indy 500 de l’année suivante. Le nom Sumer provient des premières lettres du nom des épouses Root et Smith, Susan et Mary.

Kurtis conçoit le châssis de la Sumar qui allait être propulsée par un moteur quatre cylindres en ligne Meyer-Drake/Offenhauser dans les ateliers Kurtis-Kraft situés à Los Angeles.

Durant les années 50, l’aérodynamique relève encore de la magie noire. Il est encore difficile de comprendre parfaitement les phénomènes d’écoulement des flux d’air sur un objet. Parfois, ça marche. Et d’autres fois, ça ne fonctionne pas du tout. C’est pourquoi les ingénieurs travaillent beaucoup par tâtonnements. Puisque la Sumar doit rouler très vite à Indianapolis, ses créateurs optent pour une carrosserie extrêmement fluide et lisse.

La Sumar et son pilote, Jimmy Daywalt, arrivent à Indianapolis avec cette voiture carrossée qui transporte 227 litres (60 gallons) de carburant, pèse 880 kilos (1935 livres) et est propulsée par le moteur Offenhauser qui développe la puissance de 400 chevaux à 6000 tours/minute. Le moteur est placé à l’avant du bolide et une longue tubulure d’échappement longe la voiture et ressort à l’arrière.

Daywalt, un pilote d’essais confirmé, effectue les premiers tests sur le super ovale de 2,5 milles, mais il se rend vite compte que l’aérodynamique du bolide est déficiente. En fait, la carrosserie est très lisse, mais l’air s’accumule et se trouve emprisonné dans les ailes, ce qui génère de la traînée et surtout de la portance ; c’est-à-dire que la voiture a tendance à soulever dans les lignes droites au lieu d’être plaquée au sol. Ce phénomène est accentué par le vent qui perturbe la tenue de route du bolide, surtout dans les virages.

Ce n’est pas tout. Daywalt souffre de claustrophobie dans l’étroit cockpit de la Sumar et exige qu’on retire la bulle translucide qui recouvre l’habitacle qui, de plus, nuit à sa vision. L’intérieur si à l’étroit qu’il ne parvient pas à voir les mouvements du volant quand il inscrit la voiture dans les virages, ce qui le perturbe beaucoup. Il note aussi que les ailes l’empêchent de constater l’usure des pneus. Les mécanos aussi ne pourront pas voir l’état des pneus lors des ravitaillements, ce qui est un problème majeur.

La voiture est progressivement déshabillée

Les mécanos retirent la bulle ainsi que certains éléments de la carrosserie. Daywalt reprend la piste, effectue plusieurs tours à environ 210 km/h, revient à son puits et exige qu’on retire encore d’autres bouts de la carrosserie. Ainsi, la Sumar est progressivement mise à nue et il ne reste presque plus rien de la belle robe originale ! Mais dépourvue de sa carrosserie, la Sumar produit de plus en plus de traînée, ce qui la ralentie sur les lignes droites. Les mécanos se rendent aussi compte que le bolide est trop lourd de près de 91 kilos, soit 200 livres.

Lors que la qualification, Daywalt roule à une vitesse moyenne de 224,3km/h (139,416 milles/heure) et décroche la 17e place sur la grille de départ.

Courageux, Daywalt dispute toute la course et franchit la ligne d’arrivée en neuvième position, ce qui lui procure une bourse de 6500$.

Cette histoire a toutefois une fin tragique. En 1969, un autre pilote, Marshall Teague, tente d’établir un record de vitesse sur un circuit fermé aux commandes de la Sumar. La tentative est effectuée sur le super ovale de Daytona. Après plusieurs essais, Teague effectue un tour à la vitesse moyenne de 276,5 km/h (171, 821 m/h).

Deux jours plus tard, tentant de rouler encore plus vite, la Sumar effectue un tête-à-queue à environ 230 km/ dans le virage 3. Teague est éjecté de son siège, tombe violemment sur la piste et succombe malheureusement à ses blessures.