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Le F-Duct de F1 en 2010 : Un dispositif effroyablement compliqué, ancêtre du DRS

Le F-Duct de F1 en 2010 : Un dispositif effroyablement compliqué, ancêtre du DRS

Lundi 19 octobre 2020 par René Fagnan
Crédit photo: WRI2

Crédit photo: WRI2

Les premiers tours de roue de la McLaren MP4/25 de 2010 ont créé un émoi dans la petite communauté de la Formule 1, car son capot moteur n’avait rien de très traditionnel. Il devait certainement dissimuler une trouvaille ingénieuse...

Les ingénieurs de l’écurie McLaren, dont plusieurs provenaient de l’aéronautique et de l’aviation, avaient en effet imaginé un système ultra complexe destiné à procurer un léger avantage à cette MP4/25 pilotée alors par Lewis Hamilton et Jenson Button.

Aérodynamique 101 : L’aileron arrière d’une voiture de F1 est semblable à une aile d’avion, mais inversée afin de pousser le bolide vers le bas, vers la piste. C’est ce qu’on appelle l’appui ; le flux d’air qui glisse sous le profil de l’aileron (bombé) est plus rapide que celui qui passe dessus, et cette différence de vitesse génère un écart de pression qui “pousse” l’aileron vers le bas.

Une voiture de F1 est rapide en ligne droite, mais elle le serait encore plus si cet aileron ne la freinait pas, car l’écart de pressions produit aussi des turbulences ; c’est la traînée. C’est un peu comme si la voiture devait traîner une ancre de bateau derrière elle. L’idée des gens de McLaren fut donc de faire artificiellement diminuer la traînée de l’aileron dans les lignes droites pour gagner en vitesse maximale.

Ainsi fut créé le dispositif McLaren RW80, baptisé "F-Duct" par la presse, et destiné à rediriger un flux d’air sous le profil de l’aileron afin de le faire décrocher, c’est-à-dire qu’il génère moins d’appui, donc moins de trainée.

La McLaren fut donc munie de deux conduits d’air rattachés à une écope située sur le nez de la McLaren. Un premier conduit, court, soufflait l’air sans effet aérodynamique. Un second conduit, long, acheminait air à travers la monocoque et le capot moteur vers la face avant de l’aileron arrière (voir la photo principale).

Quand la voiture roulait, l’air était expulsé sans effet par le conduit court. L’aileron arrière fonctionnait normalement et générait de l’appui. Mais quand le pilote arrivait dans une ligne droite, il bloquant une prise d’air, logée dans le cockpit, avec son genou gauche. Cette soupape faisait circuler l’air dans le second conduit. L’air parvenait à l’aileron arrière (qui était vide à cet endroit) et en ressortait par deux fentes longitudinales. Ceci réduisait la différence de pression entre les deux surfaces du profil. Bingo ! L’aileron décrochait partiellement, la traînée était diminuée et la McLaren gagnait cinq ou six kilomètre/heure en vitesse maximale, ce qui facilitait les dépassements.

Les ingénieurs des autres écuries comprirent vite l’astuce, mais le copier et l’implanter dans leurs voitures était tout sauf simple, car les conduits d’air devaient être intégrés dans la monoplace. C’était si complexe que chez certaines équipes, il a fallu refaire une monocoque complète. D’où des coûts exorbitants.

La Red Bull RB6 fut munie de son propre F-Duct un peu plus tard durant la saison, mais les pilotes devaient l’activer en obstruant la prise d’air avec le dessus de leur main gauche. Dans les lignes droites, Sebastian Vettel et Mark Webber tenaient le volant de la main droite tout en bloquant la prise d’air de la main gauche. La FIA, inquiétée par la dangerosité de cette manœuvre, intervint et décida l’interdire tous les types de F-Duct pour la saison 2011.

Toutefois, le groupe technique de la F1 se rendit compte que le F-Duct apportait un point positif, celui d’améliorer le spectacle en facilitant les dépassements. C’est ainsi que des études furent réalisée en soufflerie et menèrent au développement du DRS (Drag Reduction System).

Ce système de réduction de traînée, implanté en 2011 et toujours employé aujourd’hui, est une sorte de super F-Duct grandement simplifié en faisant simplement basculer vers l’arrière le volet supérieur de l’aileron arrière dans les lignes droites. La voiture qui en profite voit sa vitesse maximale augmentée de 10 à 15 km/h, voire 20 km/h selon les circuits, ce qui facilite grandement (trop ?) les dépassements.