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La F1 sur piste ovale ? Partie 3 : Indianapolis, Zandvoort... et l'avenir !

La F1 sur piste ovale ? Partie 3 : Indianapolis, Zandvoort... et l'avenir !

Dimanche 24 mai 2020 par Marc Cantin
Crédit photo: Ferrari Media

Crédit photo: Ferrari Media

La Formule 1 sur une piste ovale. Une idée mise en pratique dès la création du Championnat du monde et même avant cela ! Jamais vraiment couronnée de succès, elle refait surface de nos jours. Indianapolis dans un passé récent (et peut-être dans le futur), et Zandvoort au présent en sont les témoins.

Après l’histoire de la F1 sur ovale à Monza (cliquez ici pour lire l’article) et sur l’AVUS (texte ici), voici le troisième et dernier volet de ce dossier...

Pour débuter, retour à Monza pour vous présenter deux courses pour le moins inhabituelles qui eurent lieu sur l’ovale italien : un duel Amérique contre Europe (photo ci-dessous), en 1957 et 1958. La piste était alors utilisée en direction antihoraire, comme en Amérique du Nord, alors que les courses normales roulaient en sens horaire depuis la création de l’ovale en 1922.

Les pilotes américains utilisaient les gros "roadsters" de la United States Automobile Club (USAC), bien typés et solides comme un camion. Les Européens tournaient sur des voitures de circuit routier plus classiques, comme des Jaguar D-Type plus ou moins modifiées. Ferrari avait inscrit des F1 de l’époque, pilotées par un Phil Hill peu enthousiaste et un Luigi Musso qui roulait au maximum absolu sans se soucier du danger. On retrouvait aussi une magnifique Maserati 420/M/58, basée sur la 450S biplace de 450 chevaux, et carrossée en monoplace pour Stirling Moss avec un premier partenaire à faire du bruit dans les médias de l'époque : le nom des crèmes glacées Eldorado écrit sur la carrosserie !

Lors des essais, toutes les équipes travaillaient à solidifier les châssis et suspensions en vue des charges générées par l’ovale et les bosses sur les roues à rayons, les pneus, le châssis et les suspensions. La Maserati de Stirling Moss brisa d’ailleurs sa direction à pleine vitesse, alors qu’il était en pleine bataille pour la tête de la course. Pas de quoi mettre les pilotes en confiance !

En plus de Stirling Moss, la délégation européenne comptait sur une belle brochette de pilotes de F1 : Juan-Manuel Fangio, Luigi Musso, Phil Hill, Maurice Trintignant, Masten Gregory et Harry Schell. Trois spécialistes de l'endurance très "British" roulaient sur de solides Jaguar D-Type : Jack Fairman, Ivor Bueb, et Ninian Sanderson, tous déjà vainqueurs aux 24 Heures du Mans.

Luigi Musso a fait preuve d'un courage remarquable sur sa Ferrari en prenant deux poles, et terminant 3ème en 1958, alors que les pilotes américains avaient démontré, par leurs victoires, leur courage et la solidité de leurs machines, être les maîtres des courses sur ovale.

Tout cela nous amène à retraverser l’Atlantique pour vous parler de F1… à Indianapolis ! Mais on se calme, nous n’abordons pas ici la saison 2020, les rumeurs qui font état de la volonté de plus en plus affichée de Roger Penske, le nouveau propriétaire des lieux, de ramener le Grand Cirque dans l’Indiana à brève échéance, mais plutôt de la création du Championnat du monde de Formule 1 en 1950. Les bonzes de l’époque avaient cru bon d’inclure de 1950 à 1960 les 500 milles d’Indianapolis au calendrier de la saison régulière de F1, donnant l’occasion aux pilotes et voitures spécialisées de la série américaine USAC de se mesurer aux pilotes venus d’Europe et leurs voitures plus ou moins modifiées pour l’occasion.

Les pilotes terminant dans les six premiers décrochaient des points pour la saison régulière, mystifiant les amateurs de F1 qui ne connaissait rien des grands pilotes américains comme Troy Ruttman, Jim et Dick Rathman, Roger Ward ou Billy Vukovich.

L’idée était noble, mais les différences de voitures, de règlements et de tracé ont servi à limiter l’échange de pilotes et équipes. Les écuries européennes manquant surtout de temps et de budget pour faire belle figure dans une série si différente de la tradition en Europe, n’ont jamais vraiment appuyé l’idée.  

Dans cette décennie, seule Ferrari a préparé, en 1952, une voiture selon les règlements en vigueur à Indy. Alberto Ascari, le champion du monde en 1951, roulait 8ème en course avant de briser le moyeu arrière droit et terminer 25ème. Juan-Manuel Fangio tenta l’aventure en 1958, sur de mauvaises voitures américaines et abandonna avec raison le projet sans même tenter de se qualifier.

Après l’Indy 500, après l’AVUS, après Monza, revoir une F1 sur ovale n’allait être possible qu’en l’an 2000, à Indianapolis encore, mais sur un circuit mélangeant sections sur ovale et circuit routier à l’intérieur. Un concept intéressant, qui connaît un grand succès sur des circuits comme Daytona avec son épreuve annuelle de 24 Heures, mais qui pour diverses raisons n’a pas séduit entre 2000 et 2007 à Indianapolis.  Avec Roger Penske désormais aux commandes du célèbre site, parions qu’il pourrait y avoir une seconde vie pour la F1 sur ce site…

D’ici là, après 35 années d’absence, la F1 retournera à Zandvoort en 2021. Ce devait être le 3 mai dernier mais l’édition 2020 a été annulée en raison de la pandémie de coronavirus. Les Hollandais ont refait une beauté au circuit de bord de mer, situé à l’ouest d’Amsterdam, en remettant à niveau la sécurité de la piste tout en l’adaptant aux voitures d’aujourd’hui et en poussant les règles de la F1 pour ajouter au spectacle.

L’enfilade des virages 2 et 3 (Gerlacht et Hugenholz) est désormais inclinée à 18 degrés pour augmenter la vitesse en sortie et ajouter au spectacle devant les estrades. Le virage à gauche (Hans Ernst) est moins serré afin de maintenir plus de vitesse de passage, et le dernier virage (Arie Luyendijk) est maintenant incliné à 19 degrés, alors que la limite en F1 est normalement de 15. Cela donne au circuit des Pays-Bas un petit air de véritable ovale et permettra aux pilotes de sortir beaucoup plus rapidement du dernier virage pour doubler plus facilement sur le long droit.

Au niveau réglages, les ingénieurs devront couper la poire en deux pour optimiser le comportement des monoplaces sur le plat comme sur l’ovale, où on s’attend à des charges totales de 7G, comme au passage dans la cuvette au bas du Raidillon à Spa-Francorchamps.

Bravo à Jan Lammers, l’ex-pilote fort de 26 participations en F1 et lauréat (1988) des 24 Heures du Mans, qui a initié ces transformations. Le spectacle sera certainement au rendez-vous.

Crédit photo : Archives Pole-Position Magazine