Après que l'édition 1974 ait été annulée en raison de la crise pétrolière, les 24 Heures de Daytona étaient de retour l'année suivante. La course des 1er et 2 février 1975 fut marquée par la domination des Porsche Carrera RSR. C’est à cette occasion que le Québécois Jacques Bienvenue décrocha l'un de ses meilleurs résultats en Endurance internationale avec une quatrième place au classement général.
Si l’IMSA (International Motor Sports Association) sanctionnait des épreuves d’endurance depuis 1971, aucune ne durait aussi longtemps que 24 heures mais, comptant alors pour le Championnat du monde des Voitures de Sport, les 24 Heures de Daytona ont connu leur première édition en 1966. En 1973, la crise pétrolière mondiale frappa durement l’économie internationale. L’OPEP, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, ferma alors le robinet et l’essence devint une denrée extrêmement rare.
Le sport automobile dû s’y adapter et plusieurs épreuves furent raccourcies, comme ce fut le cas en 1974 quand le Daytona 500 fut présenté sur une distance de seulement 450 milles. Cette même année, les courses d’endurance de Daytona et de Sebring furent carrément annulées, car les organisateurs ne pouvaient pas garantir une fourniture suffisante de carburant pour les voitures de course.
Finalement, la situation mondiale se calme enfin et l’OPEP augmente son débit de pétrole brut. Ainsi, les 24 Heures de Daytona marquent le début de la saison 1975 de la série Camel GT de l’IMSA. L’épreuve est toutefois interdite aux prototypes et réservée aux voitures GT divisées en deux catégories : moteurs de plus de 2,5 litres de cylindrée (GTO) et moteurs de moins de 2,5 litres (GTU).
Vingt et une des voitures inscrites sont des Porsche RSR flambant neuves. Pourquoi ? Simplement parce la série IROC (International Race of Champions, une série monotype destinée à faire courir des pilotes de différents horizons aux commandes de bolides identiques) venait tout juste de changer sa règlementation. La première édition, celle de 1974, fut disputée avec des Porsche Carrera RSR. Mais les Porsche furent immédiatement abandonnées en faveur de Chevrolet Camaro. Ainsi, l’usine Porsche en Allemagne mit en vente les 15 RSR préparées pour la seconde saison de l’IROC. Elles furent achetées par des équipes d’IMSA.
Face à cette horde de bolides allemands, c’est toutefois John Greenwood qui inscrit la pole position pour ces 24 heures au volant de sa puissante Corvette. Un autre constructeur automobile allemand impressionne : BMW, qui place deux CSL d’usine en seconde et troisième places sur la grille avec des pilotes de renom comme Brian Redman, Hans Stuck, Ronnie Peterson, Dieter Quester et Sam Posey.
Le Canadien Maurice "Mo" Carter qualifie sa Camaro en quatrième place. Le Québécois Jacques Bienvenue, qui partage le volant d’une Carrera RSR toute neuve avec son propriétaire, l’Américain George Dyer, se qualifie en 12ème place. « J’étais déjà bien ami avec l’ancien chef mécano l’écurie Brumos Porsche, Hans Hermann, qui venait d’être recruté par George Dyer » nous raconte Jacques Bienvenue.
« Début 1975, George recherchait un deuxième pilote qui était à peu près de la même taille et du même poids que lui, sécuritaire en piste, rapide, doux avec la mécanique et capable de ramener la voiture en un morceau après son relais. Hans Hermann a conseillé George de m’appeler. Et nous nous sommes entendus » ajoute Bienvenue.
La course démarre et la Corvette de Greenwood ne peut rester devant le peloton bien longtemps. Les Porsche sont trop rapides. Puis, la BMW No. 25 explose son moteur après seulement 26 tours. La RSR No. 59 de l’écurie Brumos, pilotée par deux experts de l’endurance, Peter Gregg (surnommé "Peter Perfect") et Hurley Haywood, roule dans le peloton de tête quand elle entre en contact avec une Porsche mexicaine pilotée par un jeune espoir, Hector Rebaque. Les deux bolides doivent s’arrêter à leurs puits respectifs pour y faire effectuer des réparations. Les deux équipages perdent plusieurs places au classement…
Une nuit d'enfer
Gregg et Haywood se succèdent au volant de la No. 59 et gagnent des places. En début de soirée, un épais brouillard s’installe sur le circuit et la visibilité devient presque nulle. Peter Gregg est un pilote exceptionnel, mais il n’apprécie pas la conduite de nuit ou par mauvais temps. Haywood grimpe donc dans la voiture juste après minuit pour ce qui devait être un relais de trois heures. Il roule à des vitesses proches de celles de qualification. Prenant des risques fous, il conduit la RSR endommagée pendant… six heures d'affilée !
La Porsche Bumos prend la tête de la course au petit matin et reçoit le drapeau à damier en première place après avoir parcouru 684 tours du circuit et parcouru la distance de 4194,015 kilomètres à la vitesse moyenne de 174,664 km/h.
La Porsche RSR de Dyer et Bienvenue se classe au quatrième rang, à seulement trois tours de la Carrera RSR qui termine en troisième position. « Nous avons roulé dans le peloton de tête durant de longues heures à Daytona » poursuit Bienvenue. « Je me souviens d’avoir roulé sous la pluie [ou le brouillard, car Bienvenue avoue ne pas bien se souvenir] durant la nuit. Toutefois, George [Dyer] a connu des ennuis de freins, je crois. Il s’est arrêté dans l’infield juste derrière les puits. Il est revenu à pied au garage, a pris une pièce de rechange, est retourné à la voiture et a effectué la réparation pour continuer la course. En dépit de ce problème, nous avons terminé en quatrième place au classement général » précise-t-il.
Treize des 15 premières voitures à l’arrivée sont des Porsche. Les seules non-Porsche sont une Ferrari 365 GTB/4 qui se classe septième et une Mazda RX-3 de classe GTU qui termine en 14ème place. Pour rtrouver le classement complet de cette édition 1975, cliquez ici.
La photo ci-dessus montre Hurley Haywood au volant de la Porsche Carrera RSR de l’écurie Brumos qui roule devant la Chevrolet Camaro rouge du Canadien Maurice Carter et Gene Felton.