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1000 Grand Prix de Formule 1 : Alain Prost nous confie ses réflexions...

1000 Grand Prix de Formule 1 : Alain Prost nous confie ses réflexions...

Jeudi 11 avril 2019 par Philippe Brasseur
Crédit photo: Renault Sport

Crédit photo: Renault Sport

Quadruple champion du monde de Formule 1 (1985-86-89-93), Alain Prost a disputé 199 Grand Prix de Formule 1, entre 1980 et 1993. Le pilote aux 51 victoires et 33 pole positions a aussi été surnommé "Le Professeur" pour ses analyses pointues du pilotage mais aussi de la F1 en général.

Âgé aujourd’hui de 64 ans et toujours impliqué en sport automobile alors qu’il est l’un des dirigeants de l’équipe Renault F1, Alain Prost a répondu aux questions exclusives de notre correspondant au Grand Prix de Chine. L’idée de cette entrevue ? Les souvenirs générés pour lui par la F1 et tout d’abord ce que représente ces 1000 Grand Prix…

« C’est une date importante. Pour moi, ça m’a surtout fait réaliser que j’en ai fait pas loin de la moitié, que ce soit comme pilote, propriétaire d’équipe et dans d’autres activités. Ça me permet de constater l’évolution de notre sport depuis le début des années 1980 et même un peu avant car quand on est passionné et curieux, on s’intéresse au sport automobile avant même d’être pilote » explique Prost, qui ajoute : « 1000, c’est un chiffre étonnant, surprenant, qui permet de mesurer comment tout cela a évolué, autant au niveau de la technologie que l’aspect humain et les relations avec la voiture. À l’époque où j’étais pilote, on apprenait avec la voiture. Nous étions des pionniers, des pilotes essayeurs permanents en quelque sorte car c’est nous qui devions dire ce qu’il fallait apporter comme modifications à une voiture. On avait une maîtrise, un contrôle presque total de ce que l’on faisait tandis qu’aujourd’hui en Formule 1, ce sont davantage les ingénieurs avec la technologie et les datas, qui font progresser une voiture que le pilote ».

Pour lui, la combinaison de l’humain et de la technologie rend encore la F1 intéressante. « Ça reste intéressant pour cela, en unissant l’humain et la passion d’un côté, l’ingénieur et la technologie de l’autre. Si le rôle du pilote a changé, voire s’est réduit, il y a tout de même les risques en moins. Cette évolution en matière de sécurité a été constante et intéressante. Quand on regarde tout ce qui s’est passé en Formule 1 depuis la création de cette série, c’est tout de même assez incroyable ».

Pour le faire plonger dans ses souvenirs personnels en quelques minutes, la classique question du meilleur et du pire souvenir s’imposait. Alain Prost a longuement et sans détour abordé les moments le plus difficiles : « Le pire ce sont en fait tous les accidents que j’ai vu de mes propres yeux, de mes amis et copains de course. Il y a malheureusement des accidents dans lesquels j’ai été impliqué, ou qui sont arrivés proche de moi, qui me restent en mémoire. L’accident de Gilles Villeneuve à Zolder en 1982, alors que j’ai été un des premiers à m’arrêter sur les lieux, celui de Didier Pironi quelques mois plus tard à Hockenheim, lorsqu’il avait décollé sur ma voiture. Je pense aussi à celui de Patrick Depailler en 1980. Mais pour moi le pire est certainement celui d’Élio de Angelis, au Castellet en 1986. Il était bloqué dans sa Brabham qui s’était retournée et j’étais tout seul en piste avec lui à ce moment-là. On était en essais privés, il n’y avait personne autour. J’ai essayé de le sortir mais ça commençait à brûler et je n’ai pas pu le sauver ».

Alain Prost précise à ce sujet : « Personne ne peut vraiment comprendre ce que les pilotes ont pu vivre à cette période-là. Il y avait encore beaucoup d’accidents dans les années 1980. Nous les pilotes, on ne voulait pas parler de risques pour ne pas paraître fragiles, ou faibles. En même temps, on subissait à tout instant ce stress du risque en sport automobile. Il fallait trouver un compromis dans sa tête entre l’acceptation de la prise de risque et la conscience. Aujourd’hui, on n’en est plus du tout là, les pilotes actuels ont beaucoup de chance de ne plus vivre cela ».

Quant à son meilleur souvenir, si bien des fans pourraient croire à l’un de ses trois titres mondiaux, voire ses luttes en piste avec Ayrton Senna et Niki Lauda, Prost nous confie : « ce n’est pas une course en particulier mais plutôt le fait d’avoir commencé en ayant zéro moyens et au sein d’une famille qui n’était pas du tout intéressée par le sport automobile, et même par le sport en général. Donc d’avoir débuté plutôt seul et ensuite d’avoir accompli ce parcours en sport automobile, c’est cela mon meilleur souvenir ».

Un parcours qui apparaît impossible de nos jours. « Absolument. Être né 40 ans plus tard, je n’aurais jamais pu faire du sport automobile, c’est une certitude » conclut-il.